Les collections de la Villa Cavrois comprennent environ 140 objets, de dimensions et matériaux différents. La plupart ne sont pas fragiles et nécessitent seulement des conditions normales de conservation préventive (lumière, poussière, neutralité de matériaux ...). La réalisation d'une matériauthèque est née de l'idée de regrouper en un même lieu ces objets et matériaux, liés à l’état initial de la Villa Cavrois en 1932.
Parmi la multitude des objets récupérés lors de la rénovation de la Villa Cavrois, de nombreuses pièces ne pouvaient retrouver leur emplacement d'origine, en raison notamment de leur usure. Présentée dans une scénographie cette matériauthèque a été installée dans les casiers de l'ancienne cave à vins située au sous-sol (rez-de-jardin) de la Villa Cavrois. La configuration des casiers permet de présenter une partie des matériaux anciens aux côtés de ceux restitués à l’identique. L’objectif étant de saisir la démarche de restauration qui a consisté à retrouver l’état historique d’origine de la villa de 1932.
La matériauthèque est organisée en différents registres, classés selon les éléments de construction – tels que les plaquettes de brique des façades, les carreaux en ciment des terrasses – les éléments décoratifs, comme les marbres, puis les équipements techniques incluant le matériel électrique et les garde-corps extérieurs. Cet espace très didactique a pour objet de montrer combien l’architecture, au-delà du dessin, repose sur l’association de matériaux spécifiques, choisis pour leur qualité visuelle, technique ou décorative.
Les matériaux ayant été déposés pour conservation (tels des équipements comme la cabine de Jean Prouvé) ou ayant été produits en grande quantité pour permettre des réparations régulières (en premier lieu les briques) seront soit conservés en réserve soit exposés au sein de la matériauthèque en rez-de-jardin.
Ci-dessus le plan du sous-sol (rez de jardin) de la Villa Cavrois en 1932. La cave à vins est située au centre de la maison, entre les salles servant à l'entrepôt des malles - qui accueille maintenant la nouvelle chaudière - et du matériel de chasse (à l'est) et le fruitier - devenue une zone d'implantation de sanitaires - (à l'ouest). En face de cette cave à vins, se situait le garde manger (au nord), qui est devenue une zone technique. La remise, qui pouvait abriter 8 véhicules a été transformée en salle de projection. Il est possible de cliquer sur le plan pour l'agrandir.
Ces caves à vins sont constituées de trois salles avec des casiers numérotés en briques sur trois niveaux. Certains éléments de grandes dimensions (tableau électrique, table de cuisine) ne rentrent pas dans les casiers maçonnés et font l’objet d’une présentation spécifique sur cimaise menuisé dans la salle n°1.
Chaque casier était numéroté afin de permettre un suivi des bouteilles sur le livre des vins. La partie ronde de la cave à vins, comportant 18 casiers sur 3 niveaux, totalement abritée de la lumière, servait de lieu de conservation pour les meilleurs crus. Ci-dessus les casiers 76 à 84. La photographie a été prise en 2013.
La signalétique est en français, anglais et néerlandais, agrémentée de tablettes tactiles.
La maîtrise de l'ouvrage a été confiée à l'architecte Thierry Germe et à son agence lilloise, située 8 rue du sabot. Ce cabinet d'architecte a déjà réalisé, entr'autre, les superbes lustres Gaetano Pesce du musée des Beaux Arts de Lille, ainsi que de nombreuses scénographies, expositions et conception
de musées.
Ci-dessus quelques pièces métalliques présentées dans la rubrique quincaillerie et serrurerie, comme des poignées de porte ou la manivelle et les rouages des fermetures des baies vitrées, des pignons, des engrenages, des gonds, des paumelles, des charnières de porte, des serrures, des plaques de propreté.
D'autres casiers regroupent la ferronnerie et la plomberie comme une échelle de piscine, des grilles de caniveau, des grilles de ventilation, une porte de chaudière, des robinets, des pieds et une trappe de baignoire.
Les éléments électriques ne pouvaient être réutilisés, à l'exception de quelques uns, en raison des normes actuelles. Certains ont été restitués, comme les interrupteurs gérant les rampes lumineuses créées par l'ingénieur électricien André Salomon.
Parmi les objets présentés dans la matériauthèque on retrouve des tableaux électriques, des télérupteurs, des boîtiers de dérivation, des disjoncteurs, des isolateurs, des gaines, des interrupteurs, des prises de courant, des luminaires.
Dans cet espace on voit également un tableau de sonnette et un tableau téléphonique.
Ci-dessous : deux tableaux à leur place en novembre 2009.
Au niveau du sous-sol, l'éclairage original en fil torsadé (partiellement dénudé) et douilles de céramique a pu être préservé de façon factice. Les conditions de sécurité d'accueil du public dans un monument historique ont, bien entendu, du être respectées avec la mise en place de chemins de câblages (malheureusement visibles par endroit) répondant aux normes actuelles.
Une autre zone de la matériauthèque est consacrée aux bois et revêtements divers. On y retrouve des lames de parquets, des lambris, des placages, des marbres, des dalles beugin, des plinthes, des faïences, des carreaux, des mosaïques, des briques et briquettes, des tuiles, des fragments de moquette, des éclats de vitre et de miroir.
Les objectifs de la matériauthèque sont de plusieurs ordres :
- Montrer les typologies et la richesse des matériaux (construction, décor, technologie) et confronter les éléments d’origine aux éléments refaits à l’identique
- Adapter la présentation des matériaux à l’architecture spécifique des caves selon un parcours défini avec un système d’éclairage spécifique à la fois respectueux des espaces et s’intègrant discrètement au contexte des caves
- La présentation des matériaux tient compte de leur spécificité et de leur forme tout en mettant en relation la présentation de certains matériaux avec la pièce laissée en l’état située au premier étage de la villa
- La mise en accessibilité de la présentation a été prévue en intégrant un échantillonnage de matériaux pour une présentation tactile aux publics déficients visuels.
Liste des matériaux :
Construction (éléments d’origine et éléments neufs) :
- Briques de façade
- Briques creuses rouges
- Carreaux en ciment des terrasses de différents types
- Carreaux en ciment noir et blanc de la cuisine et de l’office
- Eléments spécifiques d’angles, quart de rond, plinthes
Eléments décoratifs (matériaux d’origine et neufs) :
- Fragment de parquet
- Fragments de marbres (sols, parements, marches et contremarches) de différents coloris selon provenance et formes spécifiques
- Fragment de placage.
Eléments techniques (matériaux d’origine et neufs) :
- Matériaux électriques : gaines, interrupteurs, isolateurs et tableau électrique complet
- Empreinte du réflecteur du fumoir
- Quincaillerie : paumelles, gonds, serrures, grille de ventilation
- Eléments de la chaufferie, fragments de radiateurs, cache-radiateurs
- Extérieurs, parc : fragment du garde-corps, échelle de piscine, grilles.
- Extérieurs, parc : fragment du garde-corps, échelle de piscine, grilles.
Le plan ci-dessus de l'agence d'architecture lilloise et parisienne de Thierry Germe et ses collaborateurs Valérie Lambert-Lerche, Antoine Lefevre et Pierre-Alain Du, montre l'implantation de la matériauthèque ainsi que la circulation des visiteurs. La matériauthèque se trouve à côté de l'ancien fruitier qui accueille les sanitaires. Du côté est, l'ancien garage a été transformé en espace de projection. Séparée en trois parties, l'entrée de la matériauthèque se fait à partir d'un sas. L'accès à cette zone est possible par l'ascenseur ou par les deux extrémités du sous-sol (le garage remise devenu espace de projection à l'est ou la buanderie à l'ouest). L'accès est également possible par l'escalier de service.
Ci-dessous deux plans de la même agence montrant le détail des casiers de la matériauthèque, avec leurs différents types de paniers, intégrant un éclairage, destinés à présenter et sécuriser les objets.
Certains casiers servent de stockage pour la préservation. D'autres sont laissés vide, dans l'état initial, pouvant être employé pour des expositions temporaires. Quelques casiers sont obturés en raison du passage de gaines techniques.
Sur le plan ci-dessus, expliquant la signalétique mise en place, on remarque l'emplacement (C-04) de la table de cuisine (détail ci-dessous) et du tableau électrique (C-02) présentés au fond de la salle n°1. La signalétique comporte un mur d'image et des tablettes tactiles.
Bibliographie
Dans la revue semestrielle Monumental éditée par le Centre des Monuments Nationaux un article est consacré à cette matériauthèque.
La restauration des intérieurs de la villa Cavrois, Croix : Le projet de matériauthèque / Élisabeth Portet, Paul-Hervé Parsy
Paris : Éditions du patrimoine, Centre des monuments nationaux, 2014