Mobilier



Le mobilier de la Villa Cavrois

On sait que malheureusement la totalité du mobilier de la Villa Cavrois - à l'exception d'une table de cuisine miraculeusement retrouvée au sous-sol - a été dispersé suite au décès de Madame Cavrois survenue en 1985. Une partie du mobilier a été conservé par les héritiers, le reste a été cédé. Toutefois la première vente organisée par Sotheby's à Monaco le dimanche 5 avril 1987, à la demande de la famille sera un échec commercial. Le mobilier sera finalement éparpillé chez des collectionneurs surtout depuis la deuxième vente à l'Hôtel d'Evreux, place Vendôme à Paris le 17 juin 2003. Il s’échange aujourd’hui à prix d’or, alors qu'à l'époque il n'avait guère intéressé les amateurs. Les meubles acquis par le Centre des Monuments Nationaux (CMN) lors de la vente chez Christie’s, pour une valeur de 473 000 euros, l’ont été grâce au soutien du Fonds du patrimoine et du Ministère de la culture.





Le mobilier préempté par le Centre des Monuments Nationaux (CMN) provient du boudoir de la Villa Cavrois. Il a été entièrement dessiné par Robert Mallet-Stevens. Ont été acquis plusieurs meubles dont cette coiffeuse en placage de sycomore et aluminium, avec un plateau rectangulaire sommé d'un miroir carré, ouvrant en ceinture par un miroir et flanqué de deux tablettes en L se prolongeant dans les deux pieds arrière. A signaler que les charnières des meubles ont malheureusement été transformées.


La travailleuse de boudoir, en placage de sycomore, de forme rectangulaire, le corps supérieur ouvrant par deux portes latérales centrées d'un abattant sur le dessus, découvrant un intérieur en acajou aménagé de deux compartiments amovibles au centre et flanqué de deux casiers, surmontant un casier rectangulaire en décroché, reposant sur un double piètement latéral débordant en aluminium Hauteur : 57 cm Longueur : 95 cm Largeur : 50 cm.


Parmi les autres meubles qui ont pu être acquis et qui vont donc retrouver leur emplacement d'origine, on trouve aussi cette boîte à couture, dite aussi travailleuse, avec des compartiments amovibles et casiers, en sycomore et acajou ou ces fauteuils en placage de sycomore, entièrement recouvert de toile blanche, avec dossier incliné, accotoirs galbés et pieds en aluminium.





Ci-dessous, cette paire de chauffeuses en placage de sycomore avec un dossier courbe, une assise tapissée d'une toile blanche, et des sabots en aluminium qui se trouvait dans le boudoir, pourra également être montrée en place dès la réouverture de la Villa Cavrois en juin 2015.





La table de la salle à manger des enfants ainsi que les six chaises, estimées à 100 000 €, se trouvent dans une collection particulière, depuis la vente chez Sotheby's le 6 juin 2012. Ce mobilier faisait auparavant partie de la collection de Claudia et Karsten Grève à Paris, puis de la collection d'Yvon Poulain à Paris suite à son acquisition lors de la vente Camard et Associés du 7 juin 2003 à l'Hôtel d'Evreux (Lot 115). On peut espérer qu'une dation ou une préemption lors d'une nouvelle vente permettront à ces éléments de retrouver leur cadre d'origine, malgré une surenchère, voire une spéculation, dues aux collectionneurs privés.



La description dans le catalogue Sotheby's est la suivante : Table en placage de zingana, à épais plateau rectangulaire reposant sur un piétement formé de six panneaux pleins ajourés, la base à débordement en aluminium, visseries apparentes. Hauteur 74 cm. Largeur 175 cm. Profondeur 110 cm.
Les six chaises à dossier bandeau et assise plaqués de zingana, les montants et piètements de section carrée en sycomore. Hauteur 82,5 cm. Largeur 42,5 cm. Profondeur 48 cm.





De même ces fauteuils et cette table en bois de palmier qui ornaient la chambre à coucher des parents.



Estimés à 10 000 € pièce, la paire de fauteuils, dessinée par Mallet-Stevens, qui faisait partie du mobilier de la Villa Cavrois en 1932, a été acquise par un collectionneur privé lors de la vente à Paris chez Sotheby's du 6 juin 2012. Le catalogue, pages 66 et 67, en donne la description suivante : En placage de palmier, avec de larges accotoirs fuselés et plats reposant sur des pieds avant droits à hauts sabots en laiton patiné, les pieds arrières fuselés légèrement sabre ; retapissés d'un velours beige. Hauteur 87 cm Largeur 67 cm Profondeur 63 cm. Ces deux fauteuils avaient été acquis précédemment par Yvon Poulain lors de la vente Camard et Associés à Paris le 9 décembre 2003 (Lot 44).




Ci-dessous une paire de chenets de la cheminée et des luminaires du grand hall salon, il y avait deux torchères lampadaires mesurant 1,75 m de hauteur ajoutant à l'éclairage indirect de cette pièce.





Ci-dessous quelques tables dont une table à roulettes. 






Cette petite table très colorée se trouvait dans la chambre du jeune homme.



Ci-dessus et ci-dessous, une sculpture de J. Martel que l'on voit dans le fumoir sur les photographies faites en 1986 au moment de la vente de la villa. Il s'agit d'une loutre souvent confondue dans les commentaires avec une hermine. 


Ci-dessous la petite table et un pouf du fumoir.



Ci-dessous une partie du mobilier du bureau de la Villa Cavrois, modifié par Pierre Barbe, avec le bureau, deux fauteuils et la bibliothèque retaillée.






Estimé 40 000 € lors de la vente chez Sotheby's à Paris le 6 juin 2012, ce meuble bibliothèque, dessiné par Mallet-Stevens, qui était dans le bureau de la Villa Cavrois, a été remanié par Pierre Barbe en 1948 à la demande de Paul Cavrois. Ses dimensions ont été réduites avec ajouts des montants latéraux. Cette bibliothèque avait été mise en vente précédemment par Camard et Associés à l'Hôtel d'Evreux, à Paris, le 17 juin 2003 (Lot 134). La description du catalogue de Sotheby's est la suivante : Bibliothèque en placage de sycomore, la partie supérieure en léger retrait composée de trois caissons agrémenté chacun de trois étagères, ouvrant par quatre portes coulissantes en partie basse, sur un rail en métal chromé ; les poignées enchassées en métal chromé ; l'intérieur aménagé d'étagères et tiroirs coulissants en chêne. Hauteur 219 cm. Largeur 247 cm. Profondeur 47,5 cm.


Ci-dessus des corbeilles du bureau et ci-dessous un des canapés.



Ci-dessous différents meubles des chambres, dont un fauteuil de la chambre de la gouvernante.






Ci-dessous des tabourets, une corbeille et une table de salle de bains de la Villa Cavrois.






Ci-dessous, ces chaises et cette table tubulaire étaient destinées à la terrasse.





Une chaise de la cuisine (bois et métal). Cette chaise dessinée par Robert Mallet-Stevens sera déclinée en différent coloris.


Cette chaise, redécouverte dans les années 80, apparaît sur une photo de la cuisine de la Villa Cavrois. Les deux chaises photographiées en 1931 dans la cuisine sont laquées en blanc. Elles comportent une assise noire. La chaise doit sa sortie de l’anonymat à l’architecte d’intérieur Andrée Putman. En 1978, celle-ci crée l’agence Ecart dont la division édition, Ecart/Trace, réédite des classiques oubliés ou des pièces rares des années 30 et 40. La chaise éditée reprend le modèle de la Villa Cavrois en diverses couleurs, en noir et en blanc. On la voit alors dans plusieurs réalisations d’Andrée Putman. Elle devient l’un des emblèmes du CAPC musée d’art contemporain de Bordeaux en 1984, lors de son réaménagement par Valode & Pistre et l’agence Ecart.

La version choisie pour le CAPC est une version en laque époxy gris anthracite. D’autres versions de la chaise vont voir le jour. En 1930, un brevet est déposé par la firme Tubor, avec laquelle Robert Mallet-Stevens a souvent collaboré. Une chaise de marque Tubor est datée de 1938. Une autre version, vraisemblablement pas réalisée, apparaît sous le titre Modèle N° 9, sur un dessin de la main de l’architecte conservé au Musée national d’art moderne de Bordeaux. 


Le croquis montre que Mallet-Stevens souhaitait proposer une assise ergonomique, inspirée du siège Flambo (1930). Dans les années où les artistes modernes prônent le fonctionnalisme, la chaise porte la patte de Mallet-Stevens, celle d’un fonctionnalisme que l’on pourrait qualifier d’élégant.


Ci-dessous, la table de la cuisine de la Villa Cavrois, le seul élément du mobilier a n'avoir jamais quitté cette demeure depuis sa création en 1932. Retrouvée dans la cave, elle sera un témoignage des compétences de désigner avant-gardiste de Mallet-Stevens.


Le point de vue du CMN


Le mobilier

Contrairement à ses autres réalisations, Mallet-Stevens conçoit et dessine presque l’ensemble du mobilier de la Villa ne faisant intervenir ses collaborateurs habituels, les frères Martel, Jean Prouvé ou Jacques Le Chevallier notamment, que de manière exceptionnelle. Quelques objets acquis dans le commerce complétaient également le décor intérieur. Ce mobilier, pour partie disparu, est surtout connu par les sources photographiques. Cédé pour l’essentiel en avril 1987 lors d’une vente aux enchères, le mobilier d’origine était jusqu’à présent conservé presque en totalité en mains privées.

Un programme scientifique a permis de localiser les collections anciennes de la villa.
Plusieurs ensembles mobiliers ont été ainsi acquis depuis 2009 par le Centre des monuments nationaux avec le soutien du ministère de la culture (fonds du patrimoine) à l’occasion en particulier de la vente des
collections de Laurent Négro, d’Yvon Poullain et d’Alain Braunstein. Il s’agit du mobilier du boudoir de
Madame Cavrois, comprenant une coiffeuse, une chauffeuse, une table travailleuse, une pendule, des bougeoirs, du mobilier de la salle à manger des enfants, comprenant une table et six chaises et du mobilier de la chambre parentale comprenant deux fauteuils, dans le vestibule, trois des quatre appliques aux cerceaux créées par Jacques le Chevallier et René Koechlin ainsi que l’Hermine des Frères Martel du salon-hall.
Les collections alliant luxe et modernité dans un esprit de fonctionnalité sophistiquée, réalisées dans des matériaux en harmonie avec décor intérieur, aux textiles restaurés, seront présentées telles qu’elles étaient visibles en 1932. Ce mobilier sera complété par les restitutions à l’identique des immeubles par destination menées par l’ACMH.

La restauration du mobilier

Article paru dans Ouest-France, le 27 décembre 2014, sous la plume de Jocelyne Rat.




Ils sont aux petits soins pour le patrimoine historique 



Les compagnons des Ateliers de la Chapelle, au Longeron, sont des orfèvres en ébénisterie d'art. Du musée du Louvre à Los Angeles, leurs doigts d'or redonnent vie aux témoins du passé.

Reportage
Dans l'atelier de fabrication des Ateliers de la Chapelle, Yoann peaufine des éléments de la future chambre à coucher des parents dans la villa Cavrois. Comme ses camarades compagnons, il est aujourd'hui mobilisé sur cet énorme chantier de rénovation d'une propriété nationale à Croix, dans le nord de la France.
Une villa des années 1930
« Elle a été entièrement conçue et occupée dans les années 1930 par l'architecte designer Robert Mallet-Stevens, explique Dominique Gilbert, le directeur de cette entreprise spécialisée dans l'ébénisterie d'art, la sculpture de boiseries, la polychromie, la restauration et la conservation. Cette maison de dix-huit pièces avait été laissée à l'abandon, squattée et saccagée. Chaque élément de la construction, du décor et le mobilier sont reconstitués. »
La renommée nationale de l'entreprise du Longeron, dans le Choletais, a conduit l'État à faire appel à elle une nouvelle fois. « Nous sommes chargés de restituer les décors de cette villa datée de 1932, les boiseries, les menuiseries et du mobilier. Il s'agit d'une œuvre totale dont chaque détail a été dessiné par Mallet-Stevens. »
Le travail de reconstitution représente deux années de travail pour les Ateliers de la Chapelle : « On peut estimer le temps passé par nos compagnons à 10 000 heures », calcule Dominique Gilbert.
Labellisée « Entreprise du patrimoine vivant », reconnaissance d'un savoir-faire exceptionnel, l'entreprise choletaise est une habituée des chantiers complexes. L'État lui a déjà confié la restauration d'une partie de l'aile du mobilier XVIIIe siècle au musée du Louvre (boiseries neuves, boiseries restaurées...). « Nous avons eu treize pièces à fabriquer en plus de la construction de mobilier muséographique. » Une année de travail garantie.
Les Ateliers de la Chapelle sont encore intervenus au célèbre Hôtel de la Marine, à Paris, pour restaurer des décors des XVIIe et XVIIIe siècles. « En ce moment, on s'occupe de la galerie dorée au siège parisien de la Banque de France », précise Dominique Gilbert.
Commandes de l'étranger
D'autres chantiers sont ouverts en parallèle dans l'atelier de restauration : un grand retable de l'église Saint-Paul à Bordeaux, rongé par les termites ; un petit retable de la cathédrale de Bourges ; les boiseries de l'apothicairerie royale de Saint-Germain-en-Laye... Des commandes lointaines parviennent souvent à la société du Longeron : un ouvrage pour le musée de Minneapolis aux États-Unis ou pour le musée Paul-Getty de Los Angeles.
De riches particuliers font aussi appel à son savoir-faire unique, en Amérique, en Allemagne, en Suisse, en Espagne et jusqu'en Arabie Saoudite. « Ces interventions représentent en moyenne 10 % de nos activités sur dix ans. » Elles dopent la carte de visite de l'entreprise régionale sur un marché où la concurrence s'accroît en même temps que les budgets se tassent.
Les Ateliers de la Chapelle et leurs trente salariés peuvent d'ailleurs compter sur un carnet de commandes plein et une visibilité à six mois, pour continuer à célébrer l'art de l'ébénisterie française.